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  • : Le blog de Isabelle OHMANN
  • : Articles sur l'histoire, la philosophie, l'art de différentes civilisations
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Isabelle Ohmann vous présente ce blog culturel pour partager avec vous le fruit de ses recherches.
Elle anime depuis 25 ans des activités culturelles, conférences, stages et séminaires sur des sujets ayant trait à l'histoire, la philosophie et l'art.
Elle intervient dans de nombreuses associations et apporte sa contribution à différentes publications.
Elle anime des voyages culturels vers différentes destinations (voir rubrique spécifique dans ce site).
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Voyages culturels

Isabelle Ohmann accompagne différents voyages culturels :

Florence des Médicis du 20 au 24 février 2010

Pérou, sur les traces des Incas du 2 au 13 avril 2010

Prague, ville magique du 23 au 27 octobre 2010

Pour plus dinformations, consultez les pages de ce blog
27 novembre 2009 5 27 /11 /novembre /2009 21:31

« Qu’on nous regarde donc comme des serviteurs du Christ et des intendants des mystères de Dieu ». 1ère Epître aux Corinthiens, 4, 1

 

« Le premier homme, issu du sol, est terrestre, le second, lui vient du ciel. » 1ère Epître aux Corinthiens, 15, 47

Depuis près de 2000 ans le personnage de Paul de Tarse fascine. Quel fut le parcours spirituel de ce personnage que l’on considère comme l’édificateur du christianisme ?

 

 

Paul se présente comme issu d’une famille juive établie à Tarse, ville romaine de cultes à mystères.

 

Un nazôréen

 

Avant sa conversion, Paul se définissait lui-même comme «pharisien, fils de pharisiens» de la diaspora juive. Mais lorsqu’il est arrêté à Jérusalem, vers 56, puis transféré à Césarée devant le procurateur romain Félix pour y être jugé, Tertullius, l’avocat du Sanhédrin (la plus haute instance judiciaire et religieuse juive qui avait fait condamner Jésus) l’accuse : «C’est un meneur du parti des Nazôréens» (Actes 24, 5). La réponse de Paul est affirmative : «Je t’avoue pourtant ceci : c’est suivant la Voie, qualifiée par eux de parti que je sers le Dieu de mes pères.» (Actes 24, 14). Ainsi Paul reconnaît être Nazôréen.

 

Nazareth, un lieu symbolique ?

 

On pense souvent que «Jésus le Nazaréen» signifie «Jésus de Nazareth». Mais ce n’est là qu’une interpolation. Dans ses histoires, Flavius Josèphe mentionne quarante-cinq villes et villages de la Galilée – mais jamais Nazareth, qui est donc, tout au plus, un petit hameau, dont de surcroît Jésus n’est pas originaire, puisque né à Bethléem. De plus, l’étymologie ne permet pas de rapprocher le mot «nazôréen» du nom de la ville de Nazareth. «Nazôréen» semble venir de l’hébreu nazîr (abstinent, ermite) qui désigne un homme lié à Dieu par une promesse particulière (1). «NAZARÉEN, adj. et subst. (Hist. judaïq.) est un terme employé dans l’ancien Testament, pour signifier une personne distinguée et séparée des autres par quelque chose d’extraordinaire, comme par sa sainteté, par sa dignité, ou par des vœux. Il y avait de deux sortes de nazaréat ; l’un pour un temps, qui ne durait qu’un certain nombre de jours ; l’autre pour la vie.» (2) Si les premiers disciples de Jésus furent nommés Nazaréens ou Nazôréens, ce qualificatif ne signifiait donc pas une origine géographique, mais une orientation théologique.

 

Les nazôréens, une secte historique

 

Pline l’Ancien signale, au livre V de ses Histoires naturelles, l’existence de Nazôréens installés dans la province de Syrie vers les années soixante-dix avant notre ère. C’était une secte juive antérieure au Christ. Selon Simon Claude Mimouni (3), le terme de «Nazoréen» conviendrait pour la première communauté de Jérusalem, dirigée par Jacques le Juste. Les Nazôréens seraient devenus les premiers disciples de Jésus. Ils auraient été les représentants de la ligne du maintien des observances de la Torah, des «juifs chrétiens» en quelque sorte. Des attestations sporadiques font état de leur influence de guérisseurs chrétiens en Galilée vers la fin du Ier siècle, ce qui les rapprocherait des Esséniens. C’est ce que suggère l’hérésiologue chrétien Epiphane de Salamine (367-404) dans son Panarion : «seuls quelques rares Nazoréens doivent toujours exister en Egypte supérieure…, mais le reste des Osséens (Esséniens)… se sont associés aux Ebionites». Les Nazôréens devenus minoritaires dans la Grande Eglise s’y dissoudront probablement, mais pas avant le Ve siècle.

 

Un indice de plus

 

Vers 51, Paul se fit tondre la tête à Chencrées, la ville même où fut initié Apulée, l’auteur romain de l’âne d’Or. Le nazor ou nazîr, le voué à Dieu, comme on le lit dans l’Ancien Testament, porte les cheveux longs et «le rasoir ne passera pas sur sa tête.» (Nombres, 6, 5). Mais le candidat devait sacrifier ses cheveux lors du moment de l’initiation. «Voici le rituel du nazir, pour le jour où le temps de sa consécration est révolu (6,13)… le nazir rasera sa chevelure consacrée à l’entrée de la Tente du Rendez-vous… (6,18)» Les nazirs se rasaient la tête en laissant une « couronne » de cheveux, comme celle du «nouveau-né» ce qui avait une valeur symbolique. « Ceux qui faisaient le voeu de nazaréat hors de la Palestine, et qui ne pouvaient arriver au temple à la fin des jours de leur voeu, se contentaient de pratiquer les abstinences marquées par la loi, et de se couper les cheveux au lieu où ils se trouvaient, se réservant d’offrir leurs présents au temple par eux-mêmes, ou par d’autres, lorsqu’ils en auraient la commodité. C’est ainsi que saint Paul en usa à Unchée.» (2)

 

Un initié

 

«Le fait que Paul ait été initié, au moins partiellement, sinon complètement aux mystères théurgiques laisse peu de place au doute. Son langage, le style si caractéristique des philosophes grecs, certaines expressions employées seulement par des initiés constituent autant de signes à l’appui de cette supposition.» (4)

Dans les épîtres aux Corinthiens il emploie fréquemment des expressions suggérées par les initiations de Sabazius et d’Eleusis et par la lecture des philosophes grecs. Il se qualifie lui-même d’idiotes – une personne inhabile dans le verbe, mais non dans la Gnose. « Si je ne suis qu’un profane pour la parole, pour la science, c’est autre chose ; en tout et devant tous nous vous l’avons montré. » (II Corinthiens, 11, 6)

 

La sagesse des mystères

 

«C’est bien de sagesse que nous parlons parmi les parfaits, mais non d’une sagesse de ce monde ni des princes de ce monde... Ce dont nous parlons, au contraire, c’est d’une sagesse de Dieu (sagesse divine) mystérieuse, demeurant cachée…qu’aucun des princes de ce monde n’a connue.» (I Corinthiens, 2, 6-8) La sagesse dont parle l’apôtre fait référence aux enseignements que l’on dispensait dans les mystères au «parfaits» et qui restaient inconnus au profane.

 

La révélation

 

La troisième partie des rites sacrés des mystères portait le nom d’epopteia (révélation), état qui ne pouvait être atteint que par la libération de l’âme du corps. «Je connais un homme… qui…- était-ce en son corps ? je ne sais ; était-ce hors de son corps ? je ne sais, Dieu le sait – je sais qu’il fut ravi jusqu’au paradis et qu’il entendit des paroles ineffables qu’il n’est pas permis à un homme de redire.» dit encore Paul (II Corinthiens, 12, 2-5). Il semble bien décrire sa propre initiation et selon la coutume traditionnelle explique qu’il ne peut en révéler le secret.

 

Traces esséniennes chez saint Paul

 

Pour Jean Daniélou, le contact de Paul avec une secte de type essénien ne fait presque pas de doute : «sa pensée présente des caractères qui l’apparentent à celle des manuscrits de Qumrân» (5). Sa rencontre les Esséniens se serait faite à Damas où il reçut sa première instruction, tout de suite après sa conversion. S’agissait-il d’un groupe fraîchement converti au christianisme par les Hellénistes, peut-être un des groupes Nazôréens de Syrie cités par Pline ?

Quoiqu’il en soit, sa conversion sur le chemin de Damas, le transformant de Saül, le pharisien, en Paul, le chrétien reste encore l’image la plus forte d’un itinéraire spirituel qui passa très probablement aussi par les Nazôréens.

 

 

Note : toutes les citations bibliques sont extraites de « La Bible de Jérusalem », éditions du Cerf, 1981

(1) voir également Gérard MORDILLAT et Jérôme PRIEUR dans Jésus après Jésus, l’origine du christianisme, Paris, Le Seuil, 2004.

(2) Encyclopédie, ou Dictionnaire Raisonné des Sciences, des Arts et des Métiers de Diderot et d'Alembert sur http://portail.atilf.fr/encyclopedie/

(3) Simon-Claude Mimouni, Les chrétiens d'origine juive dans l'Antiquité, Éd. Albin Michel, coll. « Présence du judaïsme poche », 2004

(4) Helena P. Blavatsky, la Doctrine Secrète,  Editions Adyar, 1982, vol V, p 129

 (5) selon le cardinal Jean Daniélou, Les Manuscrits de la Mer Morte et les origines du christianisme, Editions de l’Orante, 1974, p 91.


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article rédigé par Isabelle Ohmann - isabelle.ohmann.over-blog.com
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